Alors que Donald Trump a choisi de sortir les Etats-Unis sur le nucléaire iranien, les autres états signataires espèrent développer leurs relations avec l’Iran. Pour les membres de l’Union Européenne, le principal enjeu sera de pouvoir entrer sur le marché iranien tout en évitant les sanctions américaines. Comme l’a déclaré Angela Merkel, l’accord sur le nucléaire iranien n’est peut-être pas parfait, mais l’Union Européenne s’est engagée à le respecter pour favoriser la stabilité du Moyen-Orient. La Russie, elle aussi, continuera à respecter l’accord iranien, et devrait même accroître ses échanges avec Téhéran puisque le 17 mai 2018, l’Iran a signé un traité de libre échange avec l’Union Eurasienne menée par la Russie (l’Union Eurasienne comprend la Russie, l’Arménie, le Belarus, le Kazakhstan et le Kirghizstan).
Enfin, Beijing a réitéré son soutien à l’accord nucléaire iranien, et encourage l’ensemble de la communauté internationale à le respecter. Le retrait des Etats-Unis de cet accord devrait avoir plusieurs conséquences sur les relations entre la Chine et l’Iran et le développement des nouvelles routes de la Soie.
Une plus grande place pour le RMB
Tout d’abord, le retrait des Etats-Unis pourrait renforcer l’internationalisation du RMB. Depuis 2012, l’Iran accepte la monnaie chinoise pour ses exportations de pétrole brut vers Beijing. Ce phénomène pourrait s’amplifier en raison du retrait des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien.
Téhéran devrait chercher à diversifier ses réserves monétaires et à diminuer sa dépendance au billet vert. Le 18 avril 2018, Téhéran annonçait son souhait de privilégier la monnaie européenne au détriment du dollar dans ses échanges avec le reste du monde. Cependant, si l’UE s’alignait sur la position américaine, l’Iran pourrait alors opter pour le RMB. Pour éviter les sanctions américaines, l’euro et le RMB pourraient être utilisés conjointement par d’autres états dans leurs échanges avec l’Iran.
En mars 2018, Beijing a fait part de son intention de développer un petro yuan en inaugurant les premiers contrats en RMB au « Shanghai International Energy Exchange ». Face au Brent Londonien et au WTI américain, le petroyuan reste marginal, mais le retrait américain de l’accord nucléaire iranien pourrait le renforcer en incitant les entreprises non-américaines à utiliser le RMB pour échapper aux sanctions.
Plus d’opportunités pour les entreprises chinoises
En 2017, la Chine est devenue le premier pays importateur de pétrole, devant les Etats-Unis, c’est aussi le premier partenaire commercial de l’Iran, et Beijing est aussi un importateur majeur de pétrole saoudien.
Les entreprises pétrolières chinoises devraient se développer en Iran si les Européens se retiraient du marché par crainte des sanctions américaines. Selon l’agence Reuters, CNPC pourrait racheter la part de Total dans le projet South Pars, si l’entreprise français se retirerait du marché iranien.
De manière générale, les entreprises chinoises devraient profiter du retrait américain de l’accord nucléaire iranien.
Un obstacle aux nouvelles routes de la Soie
Cependant sur le long terme, le retrait des Etats-Unis de l’accord nucléaire iranien peut être considéré comme un obstacle à la réalisation des nouvelles routes de la Soie. L’initiative « Belt and Road » est un projet multilatéral, et sa réussite dépendra de sa capacité à attirer le plus grand nombre de pays. L’Iran a été, par le passé, un lieu de passage majeur des anciennes routes de la Soie, et sa position entre la péninsule arabique, l’Asie centrale et l’Asie du Sud continue d’en faire un carrefour important. Il ne faut pas que la décision américaine ralentisse la construction d’infrastructures passant par l’Iran, et détourne les investisseurs étrangers de ce corridor économique reliant l’Europe à la Chine.
D’autre part, ont peut craindre que le retrait américain exacerbe les tensions au Moyen-Orient et renforce la compétition régionale entre l’Iran et l’Arabie Saoudite. Aujourd’hui, plus que jamais, les nouvelles routes de la Soie sont nécessaires pour apporter la stabilité et la coopération au Moyen-Orient.
La BRI pour plus de stabilité
Le meilleur moyen d’empêcher l’Iran et les autres états de la région d’acquérir l’arme nucléaire n’est pas d’exclure Téhéran du commerce mondial, mais au contraire de renforcer son intégration régionale. La construction d’infrastructures et le renforcement des échanges grâce à la BRI est un moyen d’apporter la stabilité à la région. Des projets multilatéraux incluant à la fois l’Iran et l’Arabie Saoudite dans le cadre de la BRI constitueraient le moyen le plus efficace pour promouvoir l’apaisement.
La décision américaine ne devrait pas décourager la Chine de développer ses projets avec l’Iran, et devenir ainsi un faiseur de paix grâce à la BRI. Quant à l’Union Européenne, son intérêt (politique et économique) est de promouvoir le dialogue interrégional et de soutenir les projets des nouvelles routes de la Soie dans le but de stabiliser le Moyen-Orient.
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