Quelles conséquences sur la BRI?

Fin août 2017, Silvio Berlusconi, ancien premier ministre italien, qui ambitionne de revenir aux plus hautes fonctions de la république a relancé son idée de double monnaie pour l’Italie.

Selon cette proposition, Rome conserverait l’euro pour ses échanges avec le reste du monde, ses importations et exportations, mais une nouvelle monnaie aurait cours à l’intérieur du pays.  Cette proposition a été critiquée par plusieurs politiciens italiens, et la Commission Européenne a déjà déclaré que cette mesure ne pourrait pas être appliquée en vertu de l’article 128 du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne.

Si cette décision était prise, elle pourrait remettre en cause la participation de l’Italie à l’initiative chinoise « Belt and Road ».

Tout d’abord, cette décision impacterait fortement les investissements étrangers et notamment chinois en Europe.  La Chine a investi près de 15 milliards d’euros en Italie entre 2010 et 2015. L’Italie dispose aujourd’hui de nombreux atouts pour devenir  un acteur important de l’initiative « Belt and Road » en Europe, notamment grâce à ses bonnes infrastructures portuaires en Méditerranée et la dimension symbolique de Venise  comme centre des routes de la Soie. Mais en établissant une nouvelle monnaie, les investisseurs étrangers et notamment chinois pourraient considérer la création d’une nouvelle monnaie nationale comme une mesure protectionniste et verraient l’Italie comme une destination qui se referme. Le système de double monnaie rendrait les investissements plus compliqués et moins sûrs. Plus compliqués parce que de nouvelles règles devraient être mises en place pour règlementer l’usage de cette monnaie. Il serait plus difficile pour les petites et moyennes entreprises italiennes d’échanger avec le reste du monde. Moins sûrs, car l’objectif de cette nouvelle monnaie est principalement d’être dévaluée. Si les entreprises étrangères n’abandonnaient pas le marché italien, elles auraient recours très fortement à l’optimisation fiscale afin de transférer leurs profits dans les états membres de la zone euro.

Si l’Italie lançait cette nouvelle monnaie malgré les engagements qu’elle a pris envers l’Union Européenne, Rome ne serait plus considérée comme un partenaire fiable pour les investisseurs étrangers, et la Chine délaisserait alors l’Italie pour d’autres états méditerranéens de la zone euro pour construire les infrastructures de l’initiative « Belt and Road ».

D’autre part, en créant une nouvelle monnaie, Rome fragiliserait encore plus le système monétaire européen, ce qui pourrait créer des tensions au sein de l’Union Européenne, et ajouter une nouvelle crise à celle du Brexit. De nouvelles négociations au sein de l’Union Européenne ralentiraient les projets de coopération avec le reste du monde, et notamment avec la Chine.

Enfin, la création d’un double système monétaire en Italie aurait un effet psychologique négatif sur les investisseurs et touristes chinois.  Au début des réformes, de 1979 à 1994, la Chine a elle aussi connu un système de double monnaie avec la mise en circulation de certificats de change (Foreign exchange certificate) réservés aux entreprises et visiteurs étrangers.  Ce système  n’avait pas bonne réputation et favorisait le marché noir. Pour de nombreux chinois, la fin de ce double système monétaire signifiait l’entrée de plein pied de la Chine dans  l’économie mondiale. L’adoption d’une double monnaie par l’Italie serait difficile à expliquer aux investisseurs et touristes chinois qui considéreraient l’Italie comme un pays qui cheminerait à contre courant de l’histoire.

 

Une double monnaie pour l’Italie?
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