par Dr. Sébastien Goulard

G7 oboreurope

Le Royaume-Uni a récemment accueilli le sommet du G7 à Caris Bay du 11 au 13 juin. Les dirigeants du G7 (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, , Italie, Japon, Royaume-Uni) et des représentants de l’UE se sont réunis pour discuter des défis mondiaux. Il s’agissait du premier sommet du G7 depuis la pandémie, et les dirigeants se sont engagés à accélérer l’accès aux vaccins dans les pays en développement en faisant don de millions de doses excédentaires.

Un autre sujet majeur abordé lors de cette rencontre a concerné la Chine et les défis engendrés par sa montée en puissance. Les dirigeants de l’Australie, de l’Inde, de la Corée du Sud et de l’Afrique du Sud, quatre nations de la région Indo-Pacifique, ont également été invités à participer à l’événement. Le président américain Joe Biden, pour qui ce sommet était le premier voyage officiel à l’étranger depuis son élection, va poursuivre la politique de son prédécesseur vis-à-vis de la Chine, alors que les tensions entre les deux pays se renforcent.

Lors du sommet, le président Biden a annoncé la création d’un nouveau mécanisme de financement des infrastructures pour les pays en développement. Ce programme nommé « Build Back Better World » (B3W) (Reconstruire un  monde meilleur) est clairement conçu comme un concurrent à  l’initiative chinoise « Belt and Road »(BRI).

Le B3W

Selon le président américain, le B3W permettra aux pays en développement de recevoir jusqu’à 35 000 milliards de dollars de projets d’ici 2035. Cette initiative devrait offrir une vision d’un monde plus propre et plus vert, et devrait être une solution aux problèmes du changement climatique. Les projets développés à travers le B3W ont pour ambition d’atteindre des critères de qualité élevée et une forte transparence.

L’un des objectifs de cette initiative est d’aider les pays en développement à adopter des technologies plus vertes ; concernant cette ambition, les membres du G7 ont accepté de distribuer 100 milliards de dollars par an aux pays pauvres afin qu’ils n’aient pas à dépendre du charbon et d’autres énergies polluantes.

Il est trop tôt pour vraiment analyser la portée du B3W, car les détails concernant son fonctionnement et son financement n’ont pas encore été dévoilés. La chancelière allemande Angela Merkel a prévenu qu’aucune décision pratique n’avait encore été rpsie, mais espère que pour la prochaine réunion du G7, qui se tiendra en Allemagne en 2022, quelques projets financés via le B3W seront déjà présentés.

Sous la présidence de Joe Biden, l’administration américaine a donné une nouvelle impulsion aux infrastructures. Les États-Unis accusent un retard retard sur la Chine pour leur réseau de transport ; pour résoudre ce problème, Joe Biden a dévoilé un projet de 2,25 billions de dollars pour moderniser les infrastructures américaines et améliorer les connexions inter-cités. Le B3W peut être vu comme la continuation de cette politique intérieure.

Quelques initiatives précédentes

Le principal défi auquel l’administration américaine est confrontée avec ce projet est de ne pas décevoir les pays en développement. Ce n’est pas la première tentative faite par Washington pour rivaliser avec la BRI chinoise. Il y a deux ans, l’ancien secrétaire d’État américain Mike Pompeo avait déjà présenté un plan de financement des infrastructures à l’étranger avec la création de la United States International Development Finance Corporation. Puis, en novembre 2019, les États-Unis, en coopération avec le Japon et l’Australie, ont inauguré le « Blue Dot Network », un programme qui devait évaluer les projets de construction d’infrastructures dans la région Indo-Pacifique. Cependant, peu d’actions ont été réellement menées depuis. En mars 2021, le président Biden a également annoncé la création de l’initiative SALPIE (Small and Less Populous Island Economies), spécialement conçue pour les petits pays des Caraïbes et de la région du Pacifique. Contrairement à la BRI chinoise, ces initiatives semblent fragiles, les pays en développement sont donc relativement réticents à les rejoindre car ils ne savent pas s’ils sont pérennes ou non.

Quelles répercussions sur la BRI chinoise ?

Des responsables chinois ont déjà évoqué leur mécontentement vis-à-vis du B3W et dénoncé les critiques formulées par les pays du G7.

Le B3W peut effectivement accélérer l’amélioration de la BRI. Ce programme de connectivité a été régulièrement critiqué par certains thinktanks occidentaux pour favoriser l’endettement des pays en développement. Cependant, depuis son lancement en 2013, les projets BRI sont devenus plus inclusifs et transparents avec la participation de multinationales chinoises et étrangères. Les normes et standards appliqués aux projets BRI se sont améliorés au fil du temps. La création du concurrent B3W pourrait pousser la Chine à offrir des conditions plus favorables aux pays impliqués dans la BRI.

De nouvelles opportunités pour les pays en développement ?

L’initiative parrainée par le G7 peut offrir des opportunités aux pays d’Asie et d’Afrique qui cherchent à moderniser leurs infrastructures. Ces pays peuvent déjà solliciter un soutien financier de la Banque mondiale, de la Banque asiatique de développement, de la Banque africaine de développement ou de la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures créée par la Chine en 2014. Ils peuvent également bénéficier de certains programmes d’aide internationale proposés par les pays développés. Le B3W sera l’un des nombreux mécanismes de financement pour promouvoir le développement. La concurrence éventuelle entre la BRI et la B3W pourrait inciter les États-Unis et la Chine à offrir de meilleures conditions financières aux pays souhaitant bénéficier d’un soutien.

Cependant, pour bénéficier aux pays en développement et apporter une certaine prospérité, il est important que la BRI et le B3W restent ouvertes et non exclusives. Un pays doit rester libre d’opter pour le programme BRI pour un projet et de choisir le B3W pour un autre. De même, les entreprises étrangères doivent pouvoir continuer à participer aux projets BRI, et les entreprises chinoises devraient être autorisées à répondee aux appels d’offres préparés dans le cadre du B3W. Le principal risque associé aux tensions croissantes entre la Chine et les États-Unis est la construction de deux systèmes économiques séparés sans interaction Cette séparation n’aiderait pas les pays en développement, la BRI et B3W doivent se compléter.

Le programme “Build Back Better World”
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